LES AMÉRICAINS CROIENT EN LEUR ÉCONOMIE
Auteur : Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris
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Le Marché des USA, quel est-il ?

Avec 260 millions de consommateurs et un PNB par habitant de 27.000 $, les Etat-Unis constituent un marché formidable pour les entreprises étrangères.

Soutenue par un boom à la consommation exceptionnel (5,7 % de hausse entre août et septembre 1997), la croissance américaine n’arrête pas de surprendre atteignant 3,5 % en glissement annuel au troisième trimestre 1997.

Tous ces éléments sont favorables au dynamisme économique de ce pays, générant un exceptionnel appel de produits et de capitaux étrangers. A ce titre, les Etats-Unis sont les premiers importateurs du monde avec 799 milliards de $ en 1996 et premier pays d’accueil d’investissements étrangers.

Les perspectives du marché sont bonnes. Les Américains croient en leur économie et l’ont démontré de façon éclatante en gardant leur calme lorsque le Dow Jones a été secoué par la tourmente boursière venue d’Asie.

Avec une inflation minimale, le quasi plein-emploi et un déficit budgétaire en forte réduction (0,3 %) l’économie américaine tourne à plein régime et offre des opportunités sans précédent aux entrepreneurs et investisseurs.

Ce boom économique profite à de nombreux secteurs de l’économie. La demande en matériaux de construction est forte pour satisfaire les dépenses d’investissements publics et privés (routes, bâtiments, travaux publics, résidences...).

Les secteurs industriels liés aux logiciels, au multimédia et aux technologies de l’information se développent avec des croissances annuelles à 2 chiffres.

Les secteurs de la santé et des biotechnologies sont extrêmement actifs et profitent du fort niveau d’innovation technologique et de la facilité de mobilisation du capital-risque dans ce pays.

L’aéronautique civile a retrouvé un cycle de croissance grâce à la santé des compagnies aériennes américaines cherchant à renouveler leurs flottes.

Le segment spatial est également en pleine effervescence avec le déploiement de véritables constellations de satellites de communication autour de la terre et la demande forte de satellites géostationnaires de télécommunication et de télévision directe.

Les déréglementations actuellement en cours sont également favorables aux opportunités dans les domaines des télécommunications, l’énergie et l’eau.

Le secteur des services (banque, assurance, finance...) est en croissance permanente en termes d’emplois, de capitaux investis et de valeur ajoutée.

Enfin, la forte consommation intérieure soutient la demande dans les secteurs où les produits français sont généralement bien représentés, les produits de luxe, l’habillement, les produits agro-alimentaires.

Un marché aussi attractif n’est pas facile à conquérir pour autant.

Il demande une préparation minutieuse car il est exigeant.

C’est un marché immense aux multiples spécificité locales. La superficie du seul Texas est égale à celle de la France.

C’est un marché très concurrentiel qui réclame non seulement un produit mais aussi une qualité de services irréprochable.

C’est un marché de droit, qu’il faut aborder en examinant minutieusement les aspects juridiques, la responsabilité des produits et les contraintes liées à l’environnement.

Plusieurs solutions d’approche sont possibles.

Pour pénétrer ce marché, les entreprises françaises utilisent les voies de l’export, les joint ventures ou l’implantation de filiales.

Les chiffres de 1996 montrent que plus de 6 00 entreprises françaises exportent aux USA dont 90 % sont des PMI/PME.

Ces exportations couvrent pratiquement tous les secteurs des activités, industrielles, agro-alimentaires, distribution, service et équipements domestique et personnel.

Les Etats-Unis sont également le premier pays d’accueil de l’investissement français à l’étranger. Alors qu’il n’y avait que 400 entreprises françaises implantées aux USA en 1980, elles sont maintenant près de 1 200 à avoir pris pied outre-Atlantique, employant ainsi 400 000 personnes dans près de 2 000 filiales.

Cet investissement direct répond d’abord aux besoins des firmes multinationales françaises qui ne peuvent pas " ne pas être présentes aux USA ".

C’est le cas des principaux groupes français des secteurs industriels, services et agro-alimentaires.

Ce désir d’implantation par acquisitions place la France parmi les tous premiers investisseurs étrangers aux USA.

Néanmoins plus de 200 PMI/PME françaises ont également choisi la création de filiales ou l’acquisition d’une entreprise américaine pour améliorer leurs positions concurrentielles sur ce marché.

Enfin même si le nombre de joint ventures est plus faible, l’association GE-SNECMA pour la fabrication du moteur CFM apporte la démonstration d’une réussite évidente. En effet, le CFM représente chaque année une des parts les plus importantes du flux d’échange commercial entre les Etats-Unis et la France.

Au-delà de ces éléments économiques, quelle est la situation et où va la société américaine ?

Tout d’abord la population est en croissance continue et devrait atteindre 275 millions en l’an 2 000 et 325 en 2 020. Les minorités ethniques qui représentent actuellement ¼ de la population totale, devraient représenter la moitié de cette même population en 2050.

De même qu’en Europe, la population américaine vieillit. Entre 1960 et 1994 alors que la population américaine a progressé de 45 %, celle des " seniors " (au-dessus de 65 ans) a augmenté de 100 %. Il est intéressant de noter que l’espérance de vie américaine est très voisine de celle de la France et ce avec une protection médicale, une alimentation et des conditions de vie différentes.

Ce vieillissement de la population se traduit par des besoins supplémentaires dans les secteurs de la santé, des services aux personnes, du tourisme, des loisirs.

La répartition géographique de la population

Elle évolue également. Les Etats du sud et de l’ouest voient le plus important accroissement de population avec une forte proportion de retraités rejoignant la Floride et la Californie.

Les Américains restent attachés à un habitat urbain. 80 % d’entre eux vivent en ville, notamment dans les grandes métropoles que sont New York, Los Angeles, Chicago, Washington D.C. et San Francisco.

Néanmoins, un retour à la nature se dessine pour bon nombre de retraités et d’amoureux des grands espaces. Des évolutions positives réapparaissent dans les régions du sud, des Montagnes Rocheuses, des Grands Lacs....

La famille américaine change également. 60 % des femmes mariées ayant un enfant de moins de 6 ans travaillent alors qu’elles n’étaient que 40 % il y a 20 ans. Le nombre de familles monoparentales a augmenté de façon importante et près d’un enfant américain sur 4 est dans cette situation.

Cette évolution de la structure et de l’organisation de la famille a des conséquences. Certaines sont positives, d’autres négatives. Parmi elles, on peut noter :
une paupérisation des familles les plus défavorisées
une forte demande de services (gardes d’enfants, aides ménagères et familiales, crèches, services à la personne.....)

En ce qui concerne l’emploi

Le marché américain est caractérisé par un faible taux de chômage (inférieur à 5 %) et une forte disparité entre les salaires. En 25 ans, les 5 % des revenus les plus élevés ont augmenté de 45 % alors que les 20 % les plus faibles ont baissé de plus de 10 % en valeur ajoutée.

Cette évolution des modes de vie transforme la société américaine. Des besoins forts apparaissent en informaticiens, avocats, personnel de santé, de surveillance, d’éducation alors que la réduction est déjà fortement enclenchée pour les emplois d’ouvriers, d’agriculteurs et certains métiers du tertiaire.

Le marché des USA

Comment approcher le marché, quels écueils, quelles recommandations

Le marché américain est réputé come l’un des plus difficiles à approcher. Il demande des précautions particulières.

La première est d’intégrer les différences culturelles américaines. La culture propre d’un pays détermine des comportements considérés comme normaux et acceptables dans la société à un moment donné. L’écueil serait de parler et comprendre la langue anglaise sans véritablement être à l’écoute du marché.

En deuxième lieu, il s’agit d’intégrer leur pragmatisme.

Les Américains ont un besoin de réalisation par l’action alors que souvent les Français préféreraient une approche à fort raisonnement intellectuel. Ce pragmatisme se traduit par le souci du résultat concret rapide avant de passer à la tâche suivante. Aucun produit, même une merveille technique n’a d’intérêt s’il n’est pas vendable.

Doit-on être " Américain " en Amérique ou vaut-il mieux être Français en Amérique ?

Doit-on américaniser le nom d’un produit, faire diriger une filiale par un CEO américain ou un patron français ? A chaque cas, une réponse spécifique. Les exemples et contre-exemples sont nombreux. Ce qui compte avant tout est d’avancer de façon cohérente et constante.

Tout est possible en Amérique comme par exemple créer une entreprise avec 100 $. L’Amérique est un champ d’opportunités et de surprises. Les ressources légales sont immenses et permettent avec le travail de bons avocats de se sortir de mauvais pas.

Savoir présenter son produit, son affaire est primordial car la " perception est la réalité ".

En d’autres termes " l’emballage " est essentiel et il est très difficile de changer " une mauvaise première impression ". La qualité du service est aussi importante que la qualité du produit. Les prestataires de services, par exemple, travaillent sans relâche sur la qualité perçue lorsque le souci du détail montre l’importance que l’on attache au client.

En termes de stratégie d’approche

Il est important de faire un choix entre s’adapter ou éduquer.

Adapter ou américaniser son produit/service permet de répondre aux besoins explicites du client. On cherche alors à se donner un avantage compétitif face aux produits concurrents. Eduquer permet plutôt de répondre aux besoins implicites du client. Cette dernière approche a des avantages. Elle permet d’être le premier, la référence du marché et donc " fixer le prix ". L’inconvénient est que cette éducation demande du temps et de l’argent avant de prétendre à un retour sur investissement.

L’écueil est de choisir une solution à mi-chemin. Par crainte de perte d’identité et d’originalité, le produit français n’est pas suffisamment adapté au marché. De l’autre côté, on sous-estime les coûts et la durée d’un travail de longue haleine consistant à faire changer les goûts et comportements des consommateurs.

Les partenariats qui permettent de simplifier le processus d’approche ont l’avantage d’éliminer de nombreux écueils présentés ci-avant.

Néanmoins, une confiance aveugle peut être dangereuse car au fil des ans, le partenaire peut développer un autre agenda, il y a donc lieu de conserver une veille et des moyens d’action propres dans tous les cas.

L’Amérique est un pays de consensus

Il est important de respecter l’approche " bottom-up " et le processus montant de décision. Le chef américain hésitera toujours à prendre une décision sans dossier de ses subordonnés. Il est maladroit de s’attaquer au " top-level " sans avoir construit au préalable son argumentaire au " working-level ".

Le processus administratif américain est souvent lourd et lent, il a un avantage néanmoins : celui d’être bien maîtrisé dans le temps. Dans tous les cas, le processus doit être suivi à la lettre, même si le règlement ou les formulaires présentés paraissent mal adaptés.

L’Amérique est un pays d’expertise et l’Américain cherchera toujours à se faire assister dès qu’il en sentira le besoin (négociation...). Le Français, souvent fier d’être généraliste, néglige souvent cette dimension. Il serait suicidaire de vouloir faire face tout seul à une " armée d’experts ".

C’est également un pays qui cherche constamment à bien distinguer ce qui est privé de ce qui est de l’ordre du domaine public. Que ce soient les décideurs ou l’Américain moyen, ceux-ci réagiront négativement lorsqu’ils ne percevront pas clairement cette distinction.

Enfin dans un pays fortement imprégné de protestantisme, le mensonge est fatal et de nombreux hommes publics en ont fait les frais. Cette attitude transparaît dans le monde du business. Il faut en effet savoir communiquer, reconnaître ses fautes pour se faire pardonner auprès d’un client mécontent.

Gilbert Croze
Responsable du Développement Industrie et Service
Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris.