"L'Australie reste un pays d'entrepreneurs." Suédois, Marten Sundberg
parle couramment cinq langues. En 1982, il entre au service marketing de Somfy,
leader mondial dans la fabrication et la distribution de moteurs tubulaires pour
volets roulants et stores. Cinq ans plus tard, il a créé la filiale australienne.
"Chez Somfy, la politique veut que le service export occupe les territoires,
où les filiales n'existent pas. Mais fin 1986, les ventes ne démarraient pas.
La direction m'a proposé d'aller là-bas", raconte Marten Sundberg, 39 ans,
directeur marketing et ventes Europe. Entre janvier et avril 1987, il se rendra
quatre fois en Australie pour ficeler le dossier et proposer un budget d'implantation
: 100 000 dollars.
Banco.Le 1er mai 1987, Marten Sundberg lance la filiale, Somfy Australia, à
Sydney. Il négocie avec le groupe Damart, dont Somfy fait partie depuis 1984,
l'utilisation de l'infrastructure locale. Sur place, il embauche une secrétaire
et un électricien. "Utiliser des expatriés coûte cher. L'Australie, c'est
quand même loin. Téléphoner est coûteux et complexe. Il y a dix heures de décalage
horaire avec la France. Et trois heures d'une extrémité à l'autre du pays. L'entreprise
a besoin d'autonomie. Il est difficile de gérer un marché sans y être. Alors
j'ai démarré tout petit. Je suis allé chercher des meubles chez Ikéa pour équiper
les bureaux."
Au-delà des murs, le groupe Damart lui a apporté des facilités financières
permettant, notamment, de reculer l'approche juridique de la création d'une
nouvelle filiale. "Très vite aussi et, contrairement à ce que je pensais,
je me suis aperçu que les Australiens n'utilisaient pas de stores roulants.
Le soleil est très haut et ils n'ont donc pas besoin de stores. Durant deux
ans, j'ai contacté les fabricants européens de volets roulants, afin qu'ils
proposent leurs produits et que nous puissions vendre des moteurs et systèmes
de commande." L'homme a de la ressource. Produit sous le bras et déterminé,
il visite les menuiseries et façadiers pour lancer le marché. "En fait,
les pages jaunes étaient ma seule aide. C'est surprenant, c'est un pays où l'on
parle anglais et l'on se sent à l'aise, mais la façon de faire des affaires
n'est pas très européenne. Il faut tout de suite trouver des contacts pour avoir
des informations sur les impôts, la TVA, établir un réseau et donner une image
australienne à l'entreprise. Mais l'essentiel est d'avoir des objectifs clairs.
Savoir à quel moment il faut s'arrêter ou continuer."
Au début, Marten Sundberg a travaillé avec deux banques, l'une française pour
les paiements avec la maison mère, l'autre australienne pour les règlements
clients et, toujours s'assurer d'une image australienne. "Le plus grand
problème a été de se faire payer des clients", remarque-t-il, " il
nous a fallu adopter de strictes conditions de vente et établir des relations
humaines car nous étions une petite entreprise." Le premier exercice sera
clos avec un chiffre d'affaires de 420 000 dollars australiens. Le double, l'année
suivante. En devenant bénéficiaire, l'entreprise s'est muée, cette fois, en
société anonyme."Ce qui est impératif, ajoute Marten Sundberg, c'est de
bien maîtriser la langue, surtout sans accent français. Les relations se sont
améliorées, mais lors des essais nucléaires, elles étaient plutôt tendues".
Appelé en France, il y a deux ans, pour diriger les filiales Europe, Marten
Sundberg reconnaît que les choses ont bien progressé. "Aujourd'hui, tous
les cadres du groupe parlent couramment anglais."
Malgré un territoire aussi vaste que l'Europe et dix-sept à dix-huit millions
d'habitants, la filiale australienne demeure l'une des plus petites du groupe,
avec un chiffre d'affaires de 16 millions de francs et un effectif de douze
personnes. "Nous avons une bonne pénétration des produits. Mais, il ne
faut pas oublier que l'Australie, c’est cinq villes, disséminées sur dix fois
la France. Les transports sont longs. Il faut compter quatre à cinq jours de
camions entre les villes, trouver les transporteurs, résoudre les problèmes
logistiques. On ne parle pas de livraison par camions mais par conteneurs dont
les délais sont de six semaines par bateaux.
Aujourd'hui, une petite entreprise désireuse de s'implanter en Australie doit
d'abord réaliser une bonne étude, avec l'aide des CSNE et choisir une formule
maîtrisable. Une des précautions à prendre est de s'assurer que les brevets
sont valables là-bas. Si on sent le marché, il faut y aller. Les distributeurs
représentent aussi un moyen d'obtenir des informations, mais souvent elles ne
remontent pas. A l'époque, nous nous sommes lancés sur un marché vierge, ce
qui explique sans doute la rapidité de décision de la direction."
Marten Sundberg avait, alors, signé un contrat d'objectifs pour deux ans. "Si
je n'avais pas trouvé de successeurs et dû rester six mois de plus, je m'y serais
installé pour la vie, je crois. C'est facile de se faire des amis, c'est facile
de s'accrocher au climat. Je me suis beaucoup baladé dans la communauté française,
beaucoup de sociétés françaises ont démarré là-bas, avec le concours de CSNE.
L'un des problèmes, c'est le coût des logements. J'avais négocié...", dit-il.
On ne se refait pas. "Enfin, il y a des règles strictes si l'on veut faire
des affaires, du 1er novembre à la fin mars, durant la période d'été, la cravate
est interdite. Par contre, fin octobre, il faut l'avoir."
Marten Sundberg
Directeur Marketing et Ventes Europe
Groupe Somfy