" En Allemagne si vous ne traversez pas sur les clous, on vous le fera remarquer.
Cela peut surprendre, mais c’est comme ça. Les Allemands ont un sens
de la discipline beaucoup plus développé que le nôtre. C’est
à mon avis la différence culturelle principale entre les deux peuples,
qui peut provoquer certaines incompréhensions. Pour le reste, la vie en
Allemagne ne pose aucun problème majeur et je n’ai jamais rencontré
un Français qui soit malheureux dans son activité professionnelle.
" Benoît Zeter, directeur d’Axon’ Kabel GMBH à Stuttgart,
se montre presque démuni lorsqu’il s’agit d’évoquer
les particularités d’une installation Outre-Rhin. Il est vrai que
l’ancien responsable export d’Axon’ Câble est désormais
complètement inséré dans son pays d’accueil, où
il réside depuis huit ans.
" Sur le plan professionnel, la plus grande difficulté est d’obtenir
la confiance de ses interlocuteurs. L’opération de mécénat
que nous avons réalisée à notre arrivée nous a,
certes, aidés à nous faire connaître, mais les Allemands
sont moins sensibles que nous au mélange des genres et il nous a ensuite
fallu faire nos preuves au niveau industriel, en terme de qualités, de
délais et de fiabilité des relations commerciales. Globalement
la phase de démarrage est sans doute plus longue en Allemagne, mais quand
on a gagné la confiance d’un client, on la conserve peut-être
plus longtemps qu’en France. Les références jouent aussi
un très grand rôle. Et de ce côté-là nous sommes
désormais bien placés, avec des clients comme Deutsche Aerospace,
Siemens ou Bosch. "
Salarié sous statut allemand, Benoît Zeter relève quelques
différences notables avec le système français. " Si
la couverture sociale est comparable pour un coût sensiblement égal,
il n’existe pas en revanche, de mutuelle complémentaire. Il n’y
a d’ailleurs pas de statut cadre. La fiscalité directe est aussi
plus importante. Il faut dire que les salaires des ouvriers et des employés
sont beaucoup plus élevés qu’en France. " Autre particularité
allemande : le coût des logements. " Les loyers sont très
chers et le prix d’achat d’un appartement est deux à trois
fois supérieur à celui pratiqué dans l’hexagone.
"
En ce qui concerne la vie quotidienne, Benoît Zeter considère
que les choses se passent au mieux. Marié à une Britannique, habituée
aux longs séjours à l’étranger, le directeur de la
filiale a, il est vrai, une longue habitude de l’expatriation. Ses enfants
sont scolarisés dans un lycée européen, dont les diplômes
sont reconnus dans plusieurs pays, après avoir fréquenté
une école primaire française à Stuttgart. Il existe également
des lycées allemands qui préparent au bac français. "
Les enfants sont ravis. Ils n’ont pas d’école l’après-midi,
font beaucoup de sport, comme c’est la tradition ici et l’on trouve
des Mac Do à chaque coin de rue. " Cela dit, Benoît Zeter
ne cache pas que certains Français éprouvent de réelles
difficultés à s’insérer durablement au sein de la
société allemande. " Pour certaines familles ce n’est
pas évident et j’en connais qui ont un peu de mal. Avec l’alimentation
naturellement, mais pas seulement. Les Allemands sont généralement
plus froids et font preuve d’une plus grande distance dans leurs relations,
on ne se tape pas dans le dos facilement. Et puis il y a une sorte de pression
sociale inconnue en France. On se sent parfois surveillés par ses voisins,
qui acceptent difficilement les gens hors normes. Chose inimaginable chez nous,
les Allemands se mêlent volontiers des affaires des autres, vous expliquent
par exemple comment faire votre jardin. Les Français, ces individualistes
forcenés ont quelques difficultés à admettre de tels comportements.
"
Quant au dernier sujet en vogue entre Français et Allemands, le passage
à la monnaie unique, Benoît Zeter note un paradoxe révélateur.
" Les Allemands, dans leur majorité, sont opposés à
l’Euro, mais s’y préparent. Ils préfèrent toujours
anticiper, envisager le pire. En France c’est rigoureusement le contraire,
les gens sont plutôt favorables à la monnaie unique mais ne s’en
préoccupent pas. Ils se disent qu’ils se débrouilleront
toujours. Ce qui les rend plus souples, plus flexibles et plus créatifs.
Et ce sont, en fin de compte, des caractéristiques que les Allemands
apprécient chez nous. "
Benoît Zeter
Directeur
Axon’ Kabel